L’indemnisation du préjudice professionnel de la très jeune victime


  • Du fait de graves séquelles, résultant des conditions de sa naissance, subies par un enfant, la responsabilité du centre hospitalier au sein duquel l’accident est survenu a été recherchée. Par un arrêt devenu définitif, rendu le 27 mai 1999, une cour administrative d’appel a condamné l’hôpital à verser à l’enfant, jusqu’à l’âge de dix-huit ans, une rente annuelle.

    A la majorité de ce dernier, le tribunal administratif de Lille a été saisi par la caisse primaire d’une demande de remboursement des frais lui incombant au titre de la période postérieure à son dix-huitième anniversaire. La mère de l’enfant est intervenue à l’instance, en qualité de représentante légale de son fils et en son nom propre, pour demander l’indemnisation des préjudices subis au cours de la même période, et une indemnisation complémentaire au titre des préjudices subis antérieurement aux dix-huit ans de son fils.

    La cour administrative d’appel (CAA Douai, 30 décembre 2016, n° 14DA01526, 14DA01530) a réformé le jugement de première instance faisant partiellement droit aux demandes. Un pourvoi devant le Conseil d’Etat a alors été formé par la mère de l’enfant. Par un arrêt du 24 juillet 2019 (n° 408624), le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la cour administrative d’appel.

    L’évaluation du préjudice professionnel

    Il affirme ainsi qu’un préjudice subi à l’accouchement ou durant le jeune âge peut, dans son principe, entraîner une obligation d’indemniser la perte de chance de faire des études et la perte de revenus d’une vie professionnelle alors même que cet enfant, en situation de handicap, n’aura ni scolarité ni vie professionnelle.

    Il précise en effet que lorsque la victime se trouve, du fait d’un accident corporel survenu dans son jeune âge, privée de toute possibilité d’exercer un jour une activité professionnelle, la seule circonstance qu’il soit impossible de déterminer le parcours professionnel qu’elle aurait suivi ne fait pas obstacle à ce que soit réparé le préjudice, qui doit être regardé comme présentant un caractère certain, résultant pour elle de la perte des revenus qu’une activité professionnelle lui aurait procurés ainsi que de la pension de retraite consécutive.

    Dommages et intérêts de la victime

    Concrètement, la réparation du préjudice professionnelle est effectuée par l’octroi à la victime, à compter de sa majorité et sa vie durant, d’une rente fixée sur la base du salaire médian net mensuel de l’année de sa majorité et revalorisée par application des coefficients prévus par le code de la sécurité sociale. Il convient en revanche de déduire les sommes éventuellement perçues par la victime au titre de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH).

    Le Conseil d’Etat précise encore que lorsque la victime se trouve également privée de toute possibilité d’accéder à une scolarité, là encore, la seule circonstance qu’il soit impossible de déterminer le parcours scolaire qu’elle aurait suivi ne fait pas davantage obstacle à ce que soit réparé le préjudice ayant résulté pour elle de l’impossibilité de bénéficier de l’apport d’une scolarisation. La part patrimoniale de ce préjudice, tenant à l’incidence de l’absence de scolarisation sur les revenus professionnels, est réparée par l’allocation de la rente décrite ci-dessus.

    La part personnelle de ce préjudice ouvre à la victime le droit à une réparation que les juges du fond peuvent, sans commettre d’erreur de droit, assurer par l’octroi d’une indemnité globale couvrant également d’autres chefs de préjudice personnels au titre des troubles dans les conditions d’existence.

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