Les notes techniques du médecin de l’assurance doivent-elles être communiquées à la victime ?


  • Il est reconnu au patient un droit d’accès direct à l’ensemble de ses données de santé. La Cour de cassation fait une appréciation large de cette notion.

    Qu’est-ce qu’une note technique du médecin de l’assurance ?

    Il s’agit du document établi par le médecin de l’assurance après une réunion d’expertise amiable, aux termes duquel il rend compte des données de l’examen médical réalisé à cette occasion. Ce document comprend notamment une évaluation des préjudices de la victime, prévisionnelle en l’absence de consolidation de son état de santé.

    Pour refuser de communiquer ces notes techniques, les assureurs opposent aux victimes leur caractère confidentiel.

    Par un arrêt du 30 septembre 2021, la Cour de cassation affirme que les notes techniques des médecins désignés par les compagnies d’assurance contiennent des données de santé concernant la victime, justifiant donc leur communication à celle-ci en vertu des dispositions de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique.

    Les faits étaient les suivants :

    Un homme a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société Axa France IARD.

    Il sollicite en référé une mesure d'expertise médicale destinée à évaluer son préjudice corporel, à obtenir le versement d'une provision ainsi que la communication des notes techniques de l'expert amiable désigné par l'assureur.

    Après une décision favorable du juge des référés, la Cour d’appel a rejeté la demande de communication des notes techniques du médecin aux motifs suivants :

    « … sa demande de communication n'est pas suffisamment précise, en ce qu'elle n'est pas limitée à ses données strictement médicales auxquelles il doit pouvoir avoir accès, et qu'il ne démontre pas son intérêt légitime à obtenir les documents réclamés, dont l'existence même n'est pas établie de manière certaine, et pour lesquels l'assureur fait valoir, sans être utilement contredit, qu'ils peuvent contenir, outre des éléments médicaux, des informations strictement confidentielles d'ordre administratif et financier destinées à sa seule intention ».

    Une définition extensive du droit d'accès aux données de santé :

    La Cour de cassation casse cet arrêt.

    Elle rappelle en effet les textes applicables en la matière :

    « Vu les articles L. 1111-7 du code de la santé publique et 145 du code de procédure civile :

    Aux termes du premier de ces textes, toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers. Elle peut accéder à ces informations directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'elle désigne et en obtenir communication, dans des conditions définies par voie réglementaire au plus tard dans les huit jours suivant sa demande et au plus tôt après qu'un délai de réflexion de quarante-huit heures aura été observé.»

    Elle en déduit :

    «  Il résulte de ce texte qu'il appartient, d'une part, au médecin conseil de l'assureur chargé de procéder à l'expertise d'une victime de communiquer à celle-ci les informations relatives à sa santé, recueillies au cours de l'expertise, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, d'autre part, à l'assureur auquel le médecin conseil a transmis des informations concernant la santé de la victime de s'assurer que ce médecin les a communiquées à celle-ci. »

    Il s’agit évidemment d’un arrêt important puisque, non seulement, les assureurs ne pourront plus opposer aux victimes le caractère confidentiel des notes techniques de leurs médecins.

    Cet arrêt illustre encore l’importance du droit d’accès de la victime, et plus largement du patient, à l’ensemble des données concernant sa santé.

    Ce droit d’accès ne se limite pas au dossier médical mais s’étend à tous documents contenant des données de santé, y compris dans un cadre procédural.

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