Accident lors d’un transfert en ambulance privée à la demande du SMUR : quelles responsabilités ?


  • La charge de l'indemnisation des conséquences d'un accident survenu lors d'un transfert en ambulance privée à la demande du SMUR.

    Les fautes commises par le SMUR (service mobile d'urgence et de réanimation) engagent la responsabilité du centre hospitalier dont il dépend, sauf faute détachable du service commise par l’un de ses agents.

    Qu’en est-il lorsque le SMUR confie ponctuellement l’une de ses missions à une personne de droit privé, professionnel de santé ?

    Il s’agit d’une hypothèse tranchée récemment par la Cour de cassation.

    Les faits et la procédure :

    Une patiente a été victime, après son accouchement au sein d'une clinique, d'une grave affection pulmonaire, nécessitant son transfert dans un centre hospitalier universitaire.

    Au cours de son transfert, confié par le (SMUR) du centre hospitalier à une société privée de transport en ambulance, la patiente est tombée d'un brancard et a été gravement blessée.

    Elle a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CCI), laquelle a rendu un avis concluant à la responsabilité de la société chargée du transport.

    L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) s'est, en l'absence d'offre de l’assureur de la société d’ambulance, substitué à celui-ci et a alloué une provision à la victime ayant, à l'issue de sa consolidation, refusé l'offre d'indemnisation définitive de l'ONIAM.

    La patiente a alors assigné en responsabilité et indemnisation la société d’ambulance, l’assureur de cette dernière, et l'ONIAM.

    L'ONIAM, subrogé dans les droits de la patiente au titre de la provision versée, en a sollicité le remboursement auprès de la société d’ambulance et son assureur.

    Les premiers juges ont rejeté les demandes formées à l’encontre de la société d’ambulance et son assureur au motif que la responsabilité de la société d'ambulance privée ne pourrait être retenue qu'à condition de démontrer l'existence d'une faute détachable du service, qui n'était pas invoquée et qui n'est pas caractérisée en l'espèce.

    La victime a donc formé un pourvoi, soutenant que la responsabilité d'une société d'ambulances de droit privé agissant en exécution d'une mission de service public, sans exercer de prérogatives de puissance publique, relève de la compétence des juridictions judiciaires.

    Elle ajoutait que la faute de la société d’assurance est appréciée au regard des dispositions de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique et que c’est à tort que la cour d'appel a retenu que la faute commise ne suffisait pas à engager la responsabilité de la société d’assurance faute d'être détachable du service.

    L’ONIAM contestait également l’arrêt de la Cour d’appel, relevant qu'une société privée de transport par ambulance liée par une convention conclue avec un CHU, par laquelle celle-ci s'est engagée à mettre à disposition de celui-ci le personnel et la matériel nécessaires à certaines prises en charges de patients par le SMUR, engage sa responsabilité pour faute à l'égard de toute personne privée victime devant le juge judiciaire, sauf si cette convention lui confère une mission de service public comportant des prérogatives de puissance publique.

    La responsabilité de la société d'assurance privée :

    Par un arrêt du 4 septembre 2024 (https://www.legifrance.gouv.fr), la Cour de cassation considère que la responsabilité de la société d’ambulance privée est bien susceptible d’être engagée en pareille hypothèse, motivant sa décision comme suit :

    "Vu l'article L. 1142-1, I, alinéa 1er, du code de la santé publique :

    14. Il résulte de ce texte que les professionnels de santé, comme les sociétés professionnelles qui les emploient ou au sein desquelles ils sont associés, sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins en cas de faute.

    15. Il s'en déduit qu'une société d'ambulances privée engage sa responsabilité au titre des fautes commises durant des opérations de transport, même si son intervention a été sollicitée par un SMUR, en exécution d'une convention conclue avec un CHU, et relève alors d'une mission de service public.

    16. Pour rejeter les demandes de Mme [K] et de l'ONIAM, l'arrêt retient que la mission du SMUR étant une mission de service public, nonobstant l'absence de prérogatives de puissance publique, la faute commise par la société d'ambulance privée intervenue pour l'exécution de cette mission, à la demande du SMUR et sous son contrôle, n'étant pas détachable du service, est de nature à engager la responsabilité administrative du centre hospitalier.

    17. En statuant ainsi, alors que toute faute était susceptible d'engager la responsabilité de la société d'ambulances ayant réalisé le transfert, la cour d'appel a violé le texte susvisé."

    Ainsi, le fait que l’intervention de la société d’ambulance privée relève d’une mission de service public lorsqu’elle agit à la demande du SMUR, n’exclut aucunement que sa responsabilité puisse être engagée au titre des fautes qu’elle commet.

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