Indemnisation des conséquences du traumatisme crânien causé à un enfant chez son assistante maternelle.
Une enfant de 4 mois, confiée à une assistante maternelle accueillant plusieurs enfants à son domicile, a subi chez celle-ci un traumatisme crânien sévère.
L’assistante maternelle a indiqué que des coups avaient été portés par un autre enfant, alors âgé de 2 ans, à l'aide d'un hochet, alors qu'elle s'occupait d'un autre enfant dans une autre pièce.
La plainte pénale déposée par la mère de la victime a été classée sans suite.
Les parents de la victime, agissant en qualité de représentants légaux de leur fille, ont assigné devant un tribunal de grande instance l’assistante maternelle et les parents de l’enfant auteur des coups, en qualité de représentants légaux de leur fils, et leurs assureurs respectifs.
La Cour d’appel a déclaré l’assistante maternelle seule responsable du dommage, les circonstances de l'accident étant considérées comme indéterminées. La demande de garantie dirigée contre son assureur a été rejetée.
Les parents de la victime ont ensuite saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (la CIVI), en leurs noms personnels et en qualité de tuteurs de leur fille, à fin d'indemnisation par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le FGTI).
Les juges d’appel ont fait droit à cette demande.
Le FGTI a formé un pourvoi à l’encontre de cet arrêt, soutenant que seuls les dommages résultant de faits qui présentent le caractère matériel d'une infraction pénale peuvent être indemnisés sur le fondement des articles 706-3 et suivants du code de procédure pénale .
Il estimait qu'en jugeant que l’enfant aurait été victime de faits, commis par un autre enfant, présentant le caractère matériel d'une infraction pénale, la cour d'appel aurait violé l'article 706-3 du code de procédure pénale.
Le FGTI soutenait que le fait, pour un enfant de deux ans, de frapper un autre enfant avec un hochet de dentition ne constituerait en effet, compte tenu de son âge, ni une maladresse pouvant revêtir le caractère matériel de l'infraction de blessures involontaires, ni a fortiori un acte intentionnel pouvant revêtir le caractère matériel de l'infraction de violences volontaires.
La qualification pénale retenue :
Par un arrêt du 11 juillet 2024 (legifrance.gouv.fr), la Cour de cassation rejette le pourvoi, retenant la motivation suivante :
"9. Selon l'article 706-3 du code de procédure pénale, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992, toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne, lorsque ces faits ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois.
10. L'arrêt relève, d'abord, que les experts, reconnaissant que l'examen clinique ne permettait pas de déterminer si le traumatisme crânien avait été causé par le hochet qu'ils avaient examiné, avaient conclu qu'il n'était pas impossible que des coups portés par ce hochet aient pu entraîner les lésions constatées sur le bébé, et considère que le récit spontané de l'assistante maternelle était crédible et compatible avec les avis médicaux.
11. Il retient, ensuite, que l'origine des blessures réside dans des coups portés sur Mme [F] [P] et que ces faits caractérisent l'infraction de violences volontaires ou celle de blessures involontaires.
12. L'arrêt en déduit le droit de Mme [F] [P] à être indemnisée par le FGTI de son préjudice résultant des faits de violences, volontaires ou non.
13. La cour d'appel ayant mis en évidence le fait que Mme [F] [P], alors âgée de 4 mois, ne pouvait avoir subi les blessures constatées sans l'intervention, volontaire ou non, d'un tiers et ayant ainsi établi l'existence de faits présentant le caractère matériel de l'infraction de violences volontaires ou de blessures involontaires, rendant recevable la demande d'indemnisation devant la CIVI, peu important l'identité de leur auteur, elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision."
La Cour de cassation estime ainsi qu'une qualification pénale peut être retenue, ce qui permet dès lors l'indemnisation des préjudices de l'enfant victime d'un sévère traumatisme crânien.
Il s'agit d'une juste décision tant les séquelles d'un traumatisme crânien grave sont lourdes et invalidantes, et ce d'autant qu'elles ne peuvent être consolidées qu'une fois la croissance terminée s'agissant des enfants.
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