La défense de victimes ne peut être exercée que par un avocat.
Les "mandataires d'assurés" :
Il arrive de découvrir au gré des dossiers l’activité de « mandataire d’assurés » exercée par des professionnels proposant aux victimes d’accidents de la circulation d’intervenir au soutien de leurs intérêts auprès de l’assureur en charge de l’indemnisation de leurs préjudices.
Or, cette activité d’assistance et de représentation n’est réservée qu’aux avocats puisque cela implique une activité de consultation juridique et de rédaction d'actes.
Les faits et la procédure :
Un mandataire d’assuré a ainsi été assigné en référé devant le tribunal judiciaire par le Conseil National des Barreaux et l’Ordre des Avocats de Marseille afin qu’il lui soit fait défense d’exercer cette activité, à peine d’astreinte.
Il a été fait droit à leur demande par le juge du fond.
Le mandataire d’assurés a inscrit un pourvoi, soutenant que son activité ne s’analyserait pas en une activité de consultation juridique puisque, selon lui, constituerait une consultation juridique le fait de donner un avis sur une situation soulevant des difficultés juridiques ainsi que sur la (ou les) voie(s) possible(s) pour les résoudre.
Une activité illicite :
Par un arrêt du 07 mars 2025 (courdecassation.fr), la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation confirme l’interdiction de cette activité selon une motivation parfaitement claire :
"5. En application de l'article L. 211-10 du code des assurances, l'assureur du conducteur responsable d'un accident de la circulation doit, à peine de nullité de la transaction susceptible d'intervenir avec la victime, informer celle-ci qu'elle peut, dès l'ouverture de la procédure d'offre obligatoire, se faire assister par un avocat de son choix.
6. L'article R. 211-39 de ce code prévoit que, pour satisfaire à cette obligation légale d'information, l'assureur doit encore accompagner sa première correspondance avec la victime d'une notice relative à l'indemnisation des victimes d'accident de la circulation.
7. Si le modèle type de cette notice, figurant en annexe à l'article A. 211-11 du même code, issu de l'arrêté du 20 novembre 1987, mentionne, au titre des « conseils utiles », que la victime peut confier la défense de ses intérêts à toute personne de son choix et devra se faire représenter par un avocat en cas de procès, aucune de ces dispositions réglementaires n'autorise un tiers prestataire, autre qu'un professionnel du droit ou relevant d'une profession assimilée, à exercer, à titre habituel et rémunéré, une activité d'assistance à la victime pendant la phase non contentieuse de la procédure d'offre obligatoire, si elle comporte des prestations de conseil en matière juridique, au sens de l'article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.
8. L'arrêt relève que M. [Y] proposait dans des « mandats de gestion et procuration » de représenter les victimes d'accidents de la circulation dans le processus d'indemnisation et d'assurer toute la gestion administrative du dossier, et que ces mandats lui donnaient l'autorisation de recevoir toutes correspondances et communications, d'y répondre en leur nom, de prendre les décisions relatives à l'organisation des expertises matérielles et corporelles, de recevoir les offres d'indemnisation, de les négocier, de les accepter ou de les refuser et de percevoir pour leur compte tous les règlements leur revenant.
9. Il constate qu'il résultait des pièces versées aux débats que M. [Y] analysait les propositions d'offres d'indemnisation des assureurs, qu'il rédigeait les réponses en formulant parfois une contre-proposition, qu'il prenait des décisions quant à l'orientation des expertises médicales amiables, qu'il analysait les rapports pour conseiller ses clients sur les suites à donner et qu'il était le seul interlocuteur des assureurs pendant la phase amiable.
10. L'arrêt retient que l'intéressé ne se limitait pas à une simple gestion administrative ou à une discussion purement technique aboutissant à un calcul automatique d'indemnités, mais qu'il appréciait en fonction de la situation personnelle de chacun de ses clients et de facteurs multiples tels que le taux d'incapacité, l'âge, la situation professionnelle et personnelle ou le recours des tiers payeurs, l'indemnisation des divers postes de préjudice qui lui apparaissait la plus juste en fonction des indemnisations habituellement accordées.
11. Ayant exactement déduit qu'une telle activité d'assistance exercée, fût-ce durant la phase non contentieuse de la procédure d'offre, à titre principal, habituel et rémunéré, comportait des prestations de conseil en matière juridique, au sens de l'article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, la cour d'appel a souverainement apprécié la mesure propre à faire cesser le trouble manifestement illicite qu'elle constatait."
Il s'agit d'une juste et heureuse décision.
Un "mandataire d'assuré" ne présente en effet aucune garantie de compétence, d'assurance ni de respect de règles déontologiques strictes, contrairement aux avocats.
Il est encore nécessaire de rappeler que le droit du dommage corporel constitue une spécialité reconnue par le Conseil National des Barreaux, impliquant pour les titulaires de cette mention de spécialisation la démonstration d'une compétence et d'une expérience significatives. Elle implique également le souci d'une formation continue régulière.
Enfin, il y a lieu de rappeler qu'une affaire grave mérite un avocat spécialiste en droit du dommage corporel en raison de ses impacts sur l'ensemble des aspects de la vie d'une victime.
Aucun opportunisme ne doit donc être toléré en la matière, étant rappelé qu'une victime de dommage corporel -qu'elle soit victime directe ou victime indirecte- se trouve dans une situation de fragilité.
Seul un avocat spécialiste en droit du dommage corporel intervenant strictement au soutien des intérêts des victimes est en mesure de défendre au mieux les intérêts d'un assuré tant dans un cadre amiable que judiciaire.
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