Stérilisation: responsabilité du gynécologue.


  • Obligation du respect du délai légal de réflexion par le gynécologue.

    L'existence d'un délai obligatoire de réflexion :

    Selon l'article L. 2123-6 du code de la santé publique, la ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée que si la personne majeure intéressée a exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d'une information claire et complète sur ses conséquences et il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de réflexion de quatre mois après la première consultation médicale et après une confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une intervention.

    Ces dispositions permettent de s'assurer du plein consentement des patients face à une intervention dont les conséquences sur la fertilité sont irréversibles.

    Le médecin est ainsi tenu d'une obligation d'information exhaustive, non seulement sur les risques de l'intervention elle-même, mais également sur ses conséquences.

    Le délai de quatre mois fixé par la loi permet en outre aux patients de bénéficier d'un délai de réflexion suffisamment long pour appréhender l'ensemble de ces aspects.

    La nécessité d'une confirmation écrite des patients leur permet en outre de prendre conscience de l'importance de l'intervention projetée et de ses conséquences.

    La Cour de cassation a eu à se prononcer sur la possibilité du non respect de ce délai de quatre mois dans l'intérêt des patients.

    Les faits :

    Lors d’un entretien avec son médecin gynécologue s'étant déroulé le 31 mai 2013, une femme enceinte a sollicité de ce dernier qu’il procède à une ligature des trompes à visée contraceptive. Le médecin a procédé à cette ligature huit jours après cet entretien, le 08 juin 2013, à l'occasion de l'accouchement par césarienne.

    Le médecin a justifié cette décision par la volonté d'éviter à la patiente de subir une nouvelle intervention chirurgicale quelques mois plus tard.

    La patiente a exercé une action en responsabilité contre ce dernier.

    Les juges d'appel l'ont débouté de sa demande au motif "que les circonstances de l'intervention réalisée avaient été de nature à permettre au médecin d'y déroger, qu'il était opportun de procéder à la stérilisation lors de la césarienne pratiquée le 8 juin 2013 afin d'éviter une seconde intervention, compte tenu du risque inhérent à toute opération chirurgicale et de la demande expresse de Mme [W], telle qu'exprimée sur la fiche d'information du 31 mai 2013".

    Un pourvoi a été formé à l'encontre de cette décision.

    L'obligation de respect du délai légal :

    Par un arrêt du 13 septembre 2023 (22-18.676), la première chambre de la Cour de cassation sanctionne le raisonnement des premiers juges.

    Elle motive son arrêt comme suit:

    "Vu l'article L. 2123-6 du code de la santé publique :

    4. Selon ce texte, la ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée que si la personne majeure intéressée a exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d'une information claire et complète sur ses conséquences et il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de réflexion de quatre mois après la première consultation médicale et après une confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une intervention.

    5. Pour écarter l'existence d'une faute du médecin et rejeter les demandes à son encontre, après avoir retenu qu'il ressortait d'une fiche d'information signée par Mme [W] et datée du 31 mai 2013 que les informations nécessaires à un consentement libre et éclairée lui avaient été fournies, l'arrêt retient qu'il était opportun de procéder à la stérilisation lors de la césarienne pratiquée le 8 juin 2013, afin d'éviter une seconde intervention, en raison du risque inhérent à toute opération chirurgicale.

    6. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le délai de réflexion de quatre mois n'avait pas été respecté, la cour d'appel a violé le texte susvisé."

    La Cour de cassation rappelle ainsi le caractère obligatoire du délai de réflexion de quatre mois, lequel ne peut subir aucune exception, fût-ce dans l'intérêt de la patiente.

    La responsabilité du médecin découle ainsi de la seule constatation du non respect de ce délai.

    Il s'agit d'une décision juste et logique de la Cour de cassation.

    Ainsi que précisé ci-dessus, la ligature des trompes pratiquée chez cette patiente est une intervention lourde de conséquences sur le plan de la fertilité et il est donc indispensable que sa décision soit pleinement réfléchie.

    Ce cas d'espèce en est d'ailleurs la parfaite illustration puisque, alors que la patiente avait formulé une telle demande à son médecin, elle l'a ensuite regrettée.

     

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