Indemnisation d'une infection nosocomiale consécutive à une erreur médicale


  • L'indemnisation des infections nosocomiales

    En vertu des dispositions de l’article L. 1142-1 I alinéa 2 du code de la santé publique, les établissements de soins sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.

    Il est par ailleurs prévu à l’article L. 1142-1-1 du même code qu’ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale les dommages résultant d'infections nosocomiales dans ces établissements correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 %, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales.

    En-deçà de ces seuils de gravité, ce sont les établissements de soins qui ont la charge de l’indemnisation des conséquences des infections nosocomiales.

    Il arrive qu’un patient soit successivement victime de plusieurs accidents obéissant à des régimes de responsabilité différents.

    La difficulté est donc de déterminer le créancier de l’indemnisation des préjudices de la victime.

    Il s’agit du cas d’espèce soumis au Conseil d’Etat qui s'est prononcé le 12 février 2020.

    Une infection nosocomiale consécutive à une faute médicale

    Les faits étaient les suivants :

    Alors qu’elle était hospitalisée dans un centre hospitalier, une patiente a été victime, en tombant de son lit, d'une luxation de l'épaule nécessitant une intervention chirurgicale. C’est au cours de cette intervention qu’elle a contracté une infection nosocomiale. Elle a conservé, après sa guérison, des séquelles fonctionnelles entraînant un déficit fonctionnel permanent évalué à 40 %.

    La patiente a saisi la Commission de Conciliation et d'Indemnisation des accidents médicaux, laquelle a rendu un avis selon lequel la chute de la patiente était imputable à un défaut de surveillance fautif.

    L'assureur du centre hospitalier a refusé de suivre cet avis et de faire une proposition d'indemnisation. C’est donc l’ONIAM (Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux) qui a indemnisé la victime.

    Subrogé légalement dans les droits de celle-ci, l'ONIAM a saisi le tribunal administratif aux fins de voir condamner le centre hospitalier à lui rembourser l’indemnisation versée et à lui verser en outre une pénalité.

    Le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier à verser à l’ONIAM des indemnités couvrant les préjudices subis par la victime du seul fait de sa luxation de l'épaule et rejeté les demandes indemnitaires résultant de l'infection nosocomiale.

    La cour administrative d'appel a rejeté à son tour l'appel formé par l'ONIAM.

    Les juges du fond ont en effet considéré que la responsabilité pour faute du centre hospitalier était engagée du fait du défaut de surveillance et qu’il devait par conséquent réparer les préjudices résultant de la luxation de l’épaule.

    En revanche, ils ont estimé que l’indemnisation des conséquences de l’infection nosocomiale était à la charge de l’ONIAM puisque le déficit fonctionnel permanent de la victime était supérieur à 25 %.

    Ils ont encore estimé que, si la chute était imputable à un manquement fautif du centre hospitalier à son devoir de surveillance, il n'existait pas, pour autant, de lien de causalité suffisamment direct entre cette faute et l'infection nosocomiale contractée par la patiente.

    L'ONIAM s’est pourvu en cassation contre cet arrêt.

    L'appréciation de la causalité par le Conseil d'Etat

    Pour faire droit aux demandes de l’ONIAM, le Conseil d’Etat rappelle que « la responsabilité d'un établissement de santé au titre d'une infection nosocomiale ayant entraîné des conséquences répondant aux conditions de l'article L. 1142-1-1 ne peut être recherchée, par la victime elle-même ou ses subrogés ou par l'ONIAM dans le cadre d'une action récursoire, qu'à raison d'une faute établie à l'origine du dommage ».

    Le Conseil d’Etat, estimant que l'infection avait été contractée au cours d'une intervention rendue nécessaire par la luxation de l’épaule causée par la chute de la patiente, annule l’arrêt de la cour administrative d’appel.

    Il considère en effet que le centre hospitalier doit rembourser à l’ONIAM l’intégralité des sommes versées à la victime en réparation de l'intégralité de son préjudice, et non pas seulement l’indemnisation résultant de la luxation de l’épaule.

    Cette décision du Conseil d’Etat est parfaitement conforme à la jurisprudence permettant d’imputer un dommage à un responsable dont l’intervention n’est qu’indirecte.

    Cette application de la théorie de l’équivalence des conditions est nécessaire en matière d’indemnisation du dommage corporel puisqu’elle permet d’éviter à la victime la multiplication des recours à l’encontre de différents responsables.

    Ainsi, lorsqu’un premier accident commis par un premier responsable en a entraîné un autre commis par un autre responsable, la victime peut actionner le premier d’entre eux afin de solliciter l’indemnisation de son entier dommage. Il appartient ensuite le cas échéant à ce dernier de se retourner contre le responsable du deuxième accident pour obtenir un éventuel remboursement des sommes versées à la victime, ce qui n’est alors plus l’affaire de celle-ci, déjà entièrement désintéressée.

    En pareille hypothèse, il est impératif pour la victime d’être assistée d’un avocat spécialiste en droit du dommage corporel afin d’orienter au mieux la procédure lui permettant d’obtenir la plus juste indemnisation de ses préjudices dans des délais satisfaisants.

    Notre cabinet est évidemment à votre disposition pour vous assister dans le cadre de l'indemnisation de préjudices résultant d’accidents successifs.

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