Revirement de jurisprudence: la rente d'invalidité ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.
Par un arrêt du 06 juillet 2023 (N° 24.283 06 07 2023), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation opère un important revirement de jurisprudence.
Depuis 2013, elle estimait que la pension d'invalidité indemnisait à la fois les pertes de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle et le déficit fonctionnel permanent.
Or, en vertu des articles R. 341-4 et suivants du code de la sécurité sociale, la pension d'invalidité est calculée de manière forfaitaire, en fonction du salaire annuel moyen de l'assuré et de la catégorie d'invalidité qui lui est reconnue.
En vertu de cette jurisprudence, la victime voyait l'indemnisation de son déficit fonctionnel permanent amputée en faveur de son organisme social lui versant la rente d'invalidité.
La Cour de cassation vient de modifier sa position, retenant l'argumentation suivante:
"Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :
11. Pour limiter à la somme de 6 528,25 euros l'indemnité due par l'assureur au titre des pertes de gains professionnels actuels, l'arrêt énonce que M. [S] reconnaît dans ses écritures que son épouse a repris une partie d'une activité de maraîchage et de petit élevage que les séquelles de son accident l'empêchent d'exercer et que l'absence de pièces suffisantes versées par M. et Mme [S] ne permet pas d'établir la réalité de cette perte de revenu alléguée.
12. Pour, ensuite, débouter M. [S] de sa demande subsidiaire relativement à l'aide humaine apportée par son épouse, l'arrêt retient que si celle-ci est recevable en cause d'appel en ce qu'une victime d'un accident corporel est recevable à solliciter l'indemnisation de nouveaux postes de préjudices en lien avec les faits dont elle a été victime, cette demande ne correspond pas au poste de préjudice de la perte de gains professionnels actuels.
13. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de rechercher si le préjudice invoqué par M. [S] au titre du besoin d'assistance par son épouse pour l'activité de maraîchage et de petit élevage était ou non établi, et, dans l'affirmative, de le réparer, peu important la qualification qui lui avait été donnée par la victime au regard de la nomenclature Dintilhac, la cour d'appel a violé le principe susvisé."
Il s'agit évidemment d'une solution parfaitement juste pour les victimes de dommages corporels titulaires d'une rente d'invalidité.
Ce faisant, la deuxième chambre civile de la Cour de casation rejoint la position de l'Assemblée Plénière s'agissant de la rente accident du travail (Rente accident du travail et déficit fonctionnel permanent).
Cette évolution de la jurisprudence est une heureuse nouvelle pour les victimes.
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